France : Emmanuel Macron appelle à un nouveau partenariat avec l’Afrique 2025.
Le Président de la République Française, Emmanuel Macron a reçu le lundi 6 janvier 2025 les ambassadrices et ambassadeurs français au Palais de l’Élysée, dans le cadre de la Conférence des ambassadrices et ambassadeurs.
Le chef de l’État a souligné l’engagement international, diplomatique et militaire de la France à l’étranger et a remercié tous les Ambassadeurs pour leur travail de représentation et leur engagement au quotidien.Il a également défini les points principaux de sa feuille de route 2025 pour les Ambassadeurs :
Revoir le Discours du Président Emmanuel Macron en intégralité sur cette vidéo ci-dessous :
Le Président Emmanuel Macron appelle à un nouveau partenariat avec l’Afrique
Extrait de son discours à l’occasion de la Conférence des Ambassadrices et des Ambassadeurs.
” C’est dans cet agenda de prospérité et ces nouveaux partenariats que je veux évoquer le continent africain. Et je veux le faire là aussi avec beaucoup de reconnaissance pour tout le travail que vous faites et de clarté.
D’abord, nous avons un agenda qui doit sortir en quelque sorte des obsessions du passé. J’ai fait le maximum des efforts, et je continuerai de le faire, pour regarder les questions historiques, culturelles et mémorielles. Je crois que nous l’avons fait avec beaucoup de sincérité ces dernières années, et du travail inédit qui a été fait sur l’Algérie avec la commission Stora, en passant par le discours qui a été donné par le Ministre à Thiaroye pour le Sénégal, à la politique de restitution des œuvres d’art, conformément à l’agenda de Ouagadougou que j’avais évoqué.
Nous avons, ces dernières années, profondément changé ce logiciel. C’est-à-dire que la France regarde son passé dans sa complétude : elle a nommé les choses et elle cherche à avoir une approche scientifique, historiographique, à la fois décomplexée et dépassionnée, et nous le ferons encore avec le Cameroun, avec le comité d’historiens que nous avons installé. J’assume totalement cette politique, elle est bonne. Je le dis en tant que Président, la République naît après la décolonisation : dans un continent qui à 75 % a moins de 25 ans, le dialogue avec l’Afrique ne peut pas être l’otage d’un panafricanisme de bon aloi contemporain qui utilise en quelque sorte un discours postcolonial en ayant d’ailleurs des soutiens de revers qui sont les impérialistes d’aujourd’hui. Cette espèce de combination, de faux intellectuels, manipulant les réseaux sociaux , utilisant le désarroi d’une jeunesse et les intérêts de la Russie ou d’autres en Afrique, soyons lucides, mais n’y cédons pas. Et donc, dans ce contexte-là, non, la France n’est pas en recul en Afrique, elle est simplement lucide, elle se réorganise. Je dis ça parce que quand je lis une bonne partie de notre presse et beaucoup de commentaires, les gens, regardant avec les lunettes d’hier, disent que c’est terrible, l’Afrique, on est en train de disparaître. Non, on a choisi de bouger en Afrique. On a choisi de bouger parce qu’il fallait bouger. 1) On a regardé notre relation passée, mémorielle, culturelle. On la factualise, on l’assume, on se dit la vérité, mais on ne cède rien à la désinformation et aux ingérences. 2) Nous avions une relation sécuritaire. Elle était de deux natures, en vérité. Il y a une partie, c’était notre engagement contre le terrorisme depuis 2013. On avait raison. Je crois qu’on a oublié de nous dire merci. Ce n’est pas grave, ça viendra avec le temps. L’ingratitude, je suis bien placé pour le savoir, c’est une maladie non transmissible à l’homme. Je le dis pour tous les gouvernants africains qui n’ont pas eu le courage vis-à-vis de leurs opinions publiques de le porter, aucun d’entre eux ne serait aujourd’hui avec un pays souverain si l’armée française ne s’était pas déployée dans cette région.
J’ai une pensée émue pour nos soldats qui, parfois, ont donné leur vie et pendant des années se sont battus. Nous avons bien fait. On est partis parce qu’il y a eu des coups d’État, parce qu’on était là à la demande d’États souverains qui avaient demandé à la France de venir. À partir du moment où il y a eu des coups d’État, où les gens ont dit : « notre priorité, ce n’est plus la lutte contre le terrorisme », c’est ceci ou cela, qu’importe, la France n’y avait plus sa place, parce que nous ne sommes pas les supplétifs de putschistes. Donc, on est partis. Et ensuite, on a décidé, ça, c’est le deuxième volet, de réorganiser notre présence militaire. Pourquoi ? Parce qu’on avait, en quelque sorte, une rémanence, et on nourrissait nous-mêmes un discours post-colonial. Parce que dans les pays d’Afrique francophones, il y avait cette histoire, et donc, on avait laissé une présence installée dans nos bases. Est-ce qu’elle avait encore une justification ? Plus tellement. Est-ce que c’était ça, le rayonnement de la France ? Non. Je salue tous ceux qui ont servi, ça ne l’était plus là. Et ça n’était plus compris, c’était utilisé. C’est-à-dire que tous les réseaux d’activistes que j’évoquais venaient dire : « Regardez les Français, ils ont un camp avec 2 000 soldats, là, donc ils vont préparer un coup d’État ». Et toutes les désinformations possibles étaient utilisées contre nous.
Donc, nous avons patiemment, et je remercie Jean-Marie BOCKEL, je le remercie à double titre, personnel et pour cette mission, parce qu’il fait partie de ceux qui ont vécu dans sa chair et la chair de sa famille, ce que j’évoquais tout à l’heure. Mais il a mené patiemment, en lien avec les ministres et le CEMA, cette mission. Et donc, nous avons proposé aux chefs d’État africains de réorganiser notre présence. Comme on est très polis, on leur a laissé la primauté de l’annonce. Mais ne vous trompez pas, c’est nous qui l’avons… et parfois, il a fallu y pousser. Mais ce n’est pas parce qu’on est polis, corrects, et qu’on se réorganise nous-mêmes, qu’il faudrait que ce soit retourné contre nous en disant : « ils sont chassés d’Afrique ». Je peux vous dire que dans quelques uns de ces pays, on ne voulait pas enlever l’armée française ou même la réorganiser, mais on l’a assumé ensemble. C’est ça, le partenariat. Et donc, oui, nous sommes en train d’ouvrir un partenariat de sécurité et de défense nouveau, où on aura des bases stratégiques. Djibouti en fait partie, c’est pourquoi elle est d’une toute autre nature . Je l’ai évoquée devant nos militaires, elle sera pérenne, stable, parce qu’elle est régionale, et on va demander à nos partenaires de savoir exprimer leurs besoins en termes de défense. On va aussi faire plus de formations, plus d’équipements, plus de renseignements, plus de contrats aussi dans la durée de défense. On va qualifier la menace avec eux et on va aussi inventer de nouvelles relations, comme on l’a fait ces dernières années avec le Bénin, relation inédite, comme on va le faire avec le Nigeria, où on a commencé un dialogue stratégique qui n’existait pas jusqu’alors, ce qui était une aberration, etc. Partenariat stratégique de défense, désinhibé, mais d’avenir.
Au-delà de ça, le continent africain, c’est un continent de croissance, et là-dessus, nous sommes trop frileux. Je le dis aussi parce que quand je lis, toujours, la presse, les lunettes françaises sont obsédées par l’Afrique francophone. Il faut regarder l’Afrique francophone avec fierté. On y a des intérêts, on y a des amitiés chères chez les dirigeants, dans la société civile et ailleurs. Mais enfin, on a bien fait de faire le premier grand voyage depuis 25 ans du Nigéria en France il y a quelques semaines, 25 ans. Ce n’est qu’un pays à 250 millions d’habitants. On a bien fait d’aller faire la première visite au Kenya. Imaginez. On a bien fait de retourner pour la deuxième fois en Éthiopie, pays de plus de 100 millions d’habitants, d’avoir consolidé une stratégie énergétique et d’investissement avec l’Afrique du Sud. Nos lunettes sur l’Afrique ne sont plus les bonnes, quand on parle de l’Afrique.C’est un continent où il y a des grands émergents, où il y a des potentiels de croissance formidables, et nous sommes en train parfois de désinvestir.
Il faut retrouver de l’audace, repenser nos financements, et là-dessus, nous devons, en interministériel, repenser nos financements pour prendre plus de risques et accompagner plus de risques, repenser nos règles européennes pour qu’on ait une capacité de financement de nos grands acteurs, et avoir une stratégie avec nos entrepreneurs, toutes filières confondues, beaucoup plus ambitieuse à l’égard du continent africain et de la regarder comme un continent d’opportunités sur la question commerciale et économique, sur la question alimentaire et agricole, sur la question de l’innovation dans tous les domaines, sur la question artistique et culturelle, sur la question sportive, qui sont là aussi des domaines où nous avons des expertises, où on les a montrées au monde entier, en particulier avec les Jeux olympiques et paralympiques, et où il y a toute une stratégie export qu’on doit déployer, parce que tous les acteurs français qui ont travaillé pour nos Jeux, on veut qu’ils aillent travailler pour la Coupe d’Afrique des Nations et d’autres grandes compétitions, et que ce soit, ce faisant, une politique qui vienne en soutien avec ce qu’on fait en matière éducative et autre. Et donc, je vous fais confiance pour que ce logiciel, qu’on a commencé à changer à Ouagadougou, soit à chaque fois réexpliqué, porté, assumé, comme un logiciel de conquête.
Comme toutes les transitions, c’est difficile parce qu’il y a des nostalgiques, parce qu’il y a des gens qui ne comprennent pas ou qui ne veulent pas comprendre, et parce qu’on bouscule des intérêts acquis. Mais croyez-moi, c’est une bonne chose, parce que le monde change et que nous avons besoin d’embrasser justement ce nouveau partenariat.
Et, en parlant du continent africain, c’est en particulier ce qu’on veut faire avec le Maghreb. Pour moi, un des temps importants de ces derniers mois a été ce que nous avons réussi à bâtir avec Sa Majesté le Roi Mohamed VI. Lors de la visite d’État, plusieurs d’entre vous m’y accompagnaient il y a quelques semaines, nous avons construit un partenariat pour les décennies à venir totalement nouveau. Il est dans tous les domaines, il est d’une ambition inédite, et il est pour moi véritablement constitutif de cette nouvelle approche. Il doit d’ailleurs être un de nos relais à l’égard d’une approche africaine réinventée. C’est-à-dire qu’on aura des projets franco-marocains sur le continent africain. Parce que c’est une autre façon aussi d’aborder ce continent et de changer le regard à l’égard de la France quand on l’aborde ensemble. . Et donc le Maghreb sera aussi dans cette stratégie, pour moi au cœur d’un agenda positif : la saison méditerranéenne, le Fonds Maghreb, l’Académie des talents. Et nous ne devons pas nous résoudre, malgré les tensions qui peuvent exister avec certains, à la nécessité d’avoir un tel agenda…”
Télécharger le discours du Président de la République française devant les ambassadeurs en intégralité :